Le site pédagogique d'Anne-Claude Allin

21. oct., 2022

L'incontournable Powerpoint©

Lorsque j'ai commencé à enseigner, Powerpoint© venait d'être créé (1987), mais n'était pas encore accessible dans les institutions de formation. Les supports visuels et les supports de cours étaient variés, on utilisait alors :

• Le rétroprojecteur et ses transparents (préparés à l'avance ou élaborés au fil du cours). Personnellement, j'étais la "reine" des transparents superposables qui permettaient de construire un phénomène petit à petit en ajoutant des couches.
• Le tableau noir et ses craies ou le tableau blanc et ses feutres (pour les institutions les plus modernes).
• Le flipshart et ses feutres indélébiles (à ne pas utiliser sur le tableau blanc, merci!).
• Le polycopié de cours classique ou dans sa version en deux colonnes, permettant aux étudiants de prendre des notes sur la colonne de droite laissée libre à cet effet.
• Le livre de référence.

Puis, est venu le Powerpoint©, ses slides ou diapositives, ses incontournables listes à puces et ses effets multiples. Lorsque j'ai vu mon premier Powerpoint©, je me suis dit que je ne saurais jamais utiliser cet outil tellement l'effet était bluffant! Cela doit étonner la jeune génération d'enseignants qui est née avec cet outil! Puis j'ai appris et j'ai constaté que ce n'était pas si compliqué que je l'avais imaginé.

Aujourd'hui Powerpoint© est devenu la panacée et, si l'on cherche une alternative sur internet, on trouve d'autres logiciels, gratuits ou payants, mais toujours selon la même logique de déroulement en diapositives, sauf peut-être Predzi© qui tente une approche différente en passant d'une vision d'ensemble à des zoom sur certains aspects, ou les logiciels de mindmapping tels que Mindmanager©. Toutefois, ces alternatives n'ont pas suscité le même engouement chez les enseignants et autres conférenciers que le Powerpoint©.

J'ai tenté de résister à cette forme unique de présentation. Je me souviens d'un congrès dans lequel je participais à l'animation d'un atelier d'une journée. J'avais créé un Predzi© pour l'occasion. Or quelques jours avant la date de l'atelier, la responsable me demande de lui envoyer mon Powepoint© - comme s'il n'y avait aucune autre manière de présenter les choses - pour le dossier des participants. N'ayant pas de Powerpoint©, j'ai rédigé un texte de synthèse de trois pages pour le dossier. Les participants ont donc reçu un gros documents d'environ 70 pages, dont 67 pages de diapositives et... 3 pages de texte! J'aurais été intéressée de savoir ce qui leur a été le plus utile par la suite...

Le Powerpoint@ peut être plus ou moins bien utilisé; je voudrais souligner deux défauts majeurs, trop souvent observés, quant à son utilisation.

Trop de texte : vous avez tous déjà vu des diapositives chargées de texte. Soit le conférencier lit ses diapositives - comme si les participants ne savaient pas lire -, rien de plus ennuyeux que d'avoir sous les yeux, sur grand écran un texte lu par l'orateur, soit il ne lit pas le texte du Powerpoint©, car il sait que c'est ennuyeux, mais il le paraphrase ou s'en éloigne pour aborder d'autres éléments, ce qui laisse les participants devant un choix cornélien : écouter ou lire; les deux n'étant pas possible pour un cerveau normal. J'ai souvent entendu comme argument pour un Powerpoint© de ce genre, le fait que les étudiants avaient un document complet à la suite du cours, ce qui révèle, à mes yeux, une confusion entre support de cours (par exemple, le bon vieux polycopié d'antan qui favorise l'étude de la matière) et support visuel de discours (qui favorise la concentration, l'écoute de l'exposé). Le Powerpoint© devrait être un support de discours, un support visuel et non un support de cours. Utiliser le Powerpoint© comme support de cours risque fort d'être réducteur et empêcher les étudiants d'approfondir la matière suite au cours. Mieux vaut alors leur fournir des livres ou chapitres de référence, des articles ou encore des vidéos ou sites web et les laisser construire eux-même la synthèse.

Trop de listes à puces : une présentation uniforme, identique sur chaque diapositive, sous la forme de listes à puces, peut soutenir le discours de l'enseignant et aider à la concentration, mais elle peut être fort ennuyeuse et peut donner à penser que le savoir se décline sous la forme d'une liste à puces, sans hiérarchie ni interrelations entre les éléments. Un risque de simplification à outrance qui donne aux étudiants l'impression de maîtriser la matière s'ils mémorisent l'ensemble des puces.

Ces deux "défauts" peuvent donner à croire aux étudiants qu'il suffit de lire le Powerpoint© pour connaître la matière. De là à ne pas aller au cours et se contenter du Powerpoint© pour étudier, il n'y a qu'un pas que certains étudiants franchissent allègrement... pas très longtemps fort heureusement.

Pourtant, il est souhaitable de varier les canaux d'accès au savoir et le support visuel qui complète, soutient le discours de l'enseignant est nécessaire. Que faire donc ? Il me semble important de diversifier les supports, d'une séquence à l'autre ou d'un cours à l'autre, ce qui permettra de surprendre les étudiants et de ne pas formater leur esprit en une succession de diapositives et de listes à puces.

Il est possible de varier le support lui-même : passer de Powerpoint© à Prezi© ou Mindmanager©, de l'écran au tableau blanc ou à la caméra papier, de créer des petites vidéos de synthèse avec Powtoon© ou d'autres plateformes. Pour prendre un exemple concret, lors de ma leçon d'adieu, j'ai choisi volontairement d'écarter le Powerpoint©, l'ayant souvent critiqué auprès de mes collègues; j'ai donc utilisé deux supports différents : un poster qui présentait la structure de ma leçon et que les participants avaient sous les yeux tout au long de l'exposé et trois vidéos de quelques minutes, créées avec Powtoon©, qui présentaient des synthèses partielles de chacune des parties de mon exposé. Pendant que je m'exprimais, l'écran derrière moi était éteint.

Il est possible également, en utilisant Powerpoint©, de varier la forme et le contenu des diapositives, par exemple et je vais utiliser une liste à puces pour présenter quelques idées (!) successives :

• Les quatre ou cinq mots-clés détaillés dans une partie de son exposé.
• Un schéma ou un graphique illustrant son propos; celui-ci peut être construit au fur et à mesure du déroulement du discours.
• Une image en guise de métaphore de son propos.
• Une liste à puces, lorsqu'elle s'avère judicieuse.
• Une courte vidéo qui explique un phénomène, qui présente un témoignage ou qui présente une synthèse partielle d'une partie de son exposé.
• Une citation illustrant son propos (que l'on laissera lire aux participants).
• Une question qui introduit une partie d'exposé à laquelle ce dernier va apporter une ou des réponses.
• Un lien vers une plateforme de sondage pour favoriser l'interactivité.
• ...

Du côté des étudiants, je relèverais deux points qui me semblent essentiels :

Premièrement le Powerpoint© ne doit jamais remplacer la prise de notes pendant le cours, prise de note qui, entre autres, favorise l'intégration de la matière, qui met en évidence les éléments mal compris et, deuxièmement, le Powerpoint© ne suffit pas à l'apprentissage de la matière enseignée. Il peut toutefois être une excellente structure pour l'approfondissement et la révision, pour autant qu'il ait été bien structuré par l'enseignant.

Powerpoint© un incontournable ? Pas forcément! Vous ai-je donner envie d'essayer autre chose ? N'oubliez pas que vous pouvez réagir à ce billet en m'envoyant un message via le formulaire de contact. Je vous répondrai avec plaisir ou je rédigerai un autre billet sur le sujet ou sur tout autre sujet que vous me proposerez. Au plaisir de vous lire!